Symphonie pour 24 Heures du Mans en moteurs V12 majeurs
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Symphonie pour 24 Heures du Mans en moteurs V12 majeurs

CENTENAIRE DES 24 HEURES – UNE HISTOIRE D’INNOVATIONS ⎮ Symbole incontournable de puissance et de sportivité sur route comme sur piste, le moteur 12 cylindres en V a écrit quelques grands chapitres de la saga des 24 Heures du Mans. Avec comme constructeur pionnier Ferrari, qui a imposé pour la première fois cette architecture dans la Sarthe en 1949.

L’architecture des moteurs a toujours été au cœur des préoccupations des constructeurs pour améliorer les performances des voitures. Dès les années 1920, la lutte se circonscrit entre les moteurs 4 cylindres et les 6 cylindres…

Si les 4 cylindres en ligne l’ont emporté en 1923 et 1924 (Chenard Walker puis Bentley), les 6 cylindres en ligne prennent le pouvoir en 1925 et 1926 avec les Lorraine-Dietrich. Le 4 cylindres de Bentley reprend l’avantage en 1927, mais ce sera aussi la première apparition d’un moteur 8 cylindres en ligne, dans une SCAP. Un de ces 8 cylindres finit deuxième en 1928 (Stutz).  En 1931, Alfa Romeo fait pour la première fois triompher un moteur 8 cylindres en ligne, une performance renouvelée en 1932, 1933 et 1934. Le premier 8 cylindres en V apparaît sur une Derby en 1935, puis les premiers 12 cylindres en V sur les Delahaye en 1938, sans grand succès (abandons). Des Lagonda V12 finissent tout de même troisièmes et quatrièmes en 1939.

Mais pourquoi s’intéresser tant aux architectures des moteurs ? Parce que la puissance est l’élément fondamental que l’on attend de cet organe.

Avant les V12

Les premiers moteurs au Mans disposent donc de 4 cylindres. En augmentant les cylindrées jusqu’à 3,5 litres, pour ne pas avoir de pistons trop gros, le passage à 6 cylindres s’avère intéressant. Plus on multiplie le nombre de cylindres, plus la cylindrée unitaire est faible. Cela permet de limiter la course et l’alésage, et ainsi de diminuer l’inertie du moteur. Il monte plus facilement en régime à des vitesses de rotation plus élevées et fournit ainsi généralement plus de puissance à cylindrée égale. On peut continuer à multiplier le nombre de cylindres à 8 voire 12 cylindres. On a même vu un 16 cylindres en Formule 1.

En ligne ou en V ? Le choix de cette architecture fixe la longueur du moteur. Pour un 4 cylindres, on ne se pose pas trop la question. Dès qu’on dispose de 6, 8 ou de 12 cylindres, cette longueur peut être limitée en le séparant en deux bancs de 3, 4 ou 6 cylindres. Tout d’abord pour limiter la longueur du vilebrequin, diminuant ainsi les vibrations induites, et aussi pour limiter le nombre de paliers et réduire les frottements qui absorbent de la puissance. D’autre part, cela permet de mieux installer le moteur plus court dans la voiture. Du temps des moteurs avant, on évite l’allongement du capot avec une installation en position centrale arrière, l’allongement de l’empattement aurait été trop pénalisant. Ainsi, un moteur V12 ne devient pas plus encombrant qu’un moteur 6 cylindres en ligne et un V6 est plus court qu’un 4 cylindres en ligne.

Ferrari ou le culte du V12

Dès la reprise après-guerre en 1949, une jeune marque nommée Ferrari arrive avec un moteur V12 de seulement 2 litres de cylindrée, et avec une victoire à la clef. La légende du constructeur italien et de son architecture moteur fétiche est en train de se construire. Cette victoire est confirmée par un nouveau succès en 1954 avec un V12, cette fois d'une cylindrée de 4954 cm3.

Les règlements et leurs contraintes vont passer par là.  Ce qui va fortement limiter les cylindrées des moteurs en 1956, et les Ferrari de cette année-là roulent avec des 4 cylindres 2 ,5 litres avant de revenir aux V12 de 3800 cm3 dès 1957.

En 1958, le V12 de Maranello, ramené 3 litres de cylindrée (toujours en raison d’une évolution du règlement) signe une probante victoire. Ce type de moteur va caractériser les prototypes de la Scuderia, hormis quelques voitures engagées en parallèle, avec des V6 Dino par exemple. Ces mêmes moteurs sont installés dans les inoubliables GTO qui courent en catégorie GT

Après un trou d’air en 1959, avec la victoire d’une Aston Martin, Ferrari enchaîne six succès entre 1960 et 1965. La cylindrée des V12 va augmenter, de 3 litres de 1960 et 61, à 4 litres en 62, pour revenir 3 litres en 1963, mais installé pour la première fois en position centrale arrière. Ensuite, l’intensité de la lutte avec Ford force Ferrari à augmenter petit à petit la cylindrée des V12 pour combattre les V8  5 litres puis 7 litres américains. Ils passent à  3.3 litres en 1964, puis à 4 litres en 1965 (même si c’est un moteur 3,3 litres qui gagne). En 1966 et 1967 les Américains l’emportent avec leur V8 7 litres, Ferrari ayant pourtant poussé son V12 à 4 litres et même 4.4 litres.

Durant cette période, Maserati s’essaye aussi au V12, sans pourtant en maitriser la fiabilité, avant de revenir aux V8.

Le V12 selon Matra et Porsche

En 1968, avec le retrait officiel de la Scuderia, il ne reste que quelques Ferrari 275 LM ou GTB privées pour faire résonner le V12 du cheval cabré. Mais un autre V12 à la sonorité stridente va sidérer les spectateurs manceaux. Cette année-là voit en effet les débuts du 3 litres Matra !

L’année suivante, un autre douze cylindres, à plat celui-là, rejoint Matra. Avec 4.5 litres de cylindrée et un refroidissement à air, il est installé dans la Porsche 917 dont la vitesse de pointe a marqué les esprits. Et dès l’année suivante le flat 12 allemand s’impose puis signe une deuxième victoire consécutive en 1971, battant des V12 Ferrari,  de retour sur les 512 S puis 512 M. A cet apogée, en 1970, on compte sur la grille de départ 22 voitures à moteur 12 cylindres (à plat ou en V), puis 19 en 1971.

Au début de l’ère des 3 litres, les trois années suivantes, le V12 Matra aligne les victoires, tout en gérant une grandiose bagarre avec le nouveau Flat 12 Ferrari en 1973. Cette année-là, nous aurons encore 17 voitures à 12 cylindres au départ (mais seulement sept en prototypes) puis dix seulement en 1974.

La mode n’est plus au moteur V12. Ce type de moteur était très performant et délivrait plus de puissance que les V8. Mais douze pistons frottant contre les parois des 12 cylindres et les régimes de rotation très élevés généraient plus de consommation. Dès 1975, première année de la course à la consommation, il ne reste en GT que deux Ferrari Daytona. A partir de 1976, aucun 12 cylindres n’est au départ en catégorie prototypes, le peloton étant composé de V6 turbocompressés ou de V8 atmosphériques. Seules quelques Ferrari GT, dont l’inoubliable BB 512, entretiendront la flamme du V12 jusqu’en 1984…

Les V12 du 21e siècle

Si l’on excepte l’aventure d’une Porsche 917 « modernisée » en 1981, il faudra attendre l’avènement du groupe C pour retrouver des 12 cylindres. Et Jaguar qui ramène un V12 de grosse cylindrée (7 litres) à la victoire en 1988 et 1990. Mais elles seront victimes du règlement de la FIA qui impose le V10 3.5 litres commun à la Formule 1 et à l’endurance en 1992 et 93.

L’assouplissement des règles entre 1994 et 2000 va permettre au V12 de retrouver son lustre, avec cette fois BMW à la manœuvre. Ce moteur gagne une première fois installé dans une McLaren F1 en 1995, puis signe une deuxième victoire en 1999, dans un prototype d'usine de la maison mère à l'hélice. 

Le passage au LMP1 et le retrait officiel de BMW vont de nouveau laisser le V12 sans voix après une dernière apparition avec une voiture privée en 2000. Seules quelques Ferrari (toujours elles) en GT, comme les 550 Maranello et 575 GTC y seront fidèles jusqu’en 2005.

Heureusement, le passage aux moteurs TDI (turbo diesel) va relancer la course au nombre de cylindres. Pour obtenir plus de puissance d’un moteur diesel, il faut des gros moteurs de forte cylindrée. Avec 5500 cm3, Audi adopte le V12 sur ses R10, mais lui a adjoint deux turbocompresseurs. Peugeot arrive aux mêmes conclusions et propose une 908 HDi FAP, également motorisée par un V12 biturbo de 5500 cm3. Les V12 signent ainsi quatre nouvelles victoires (trois Audi et une Peugeot). Pourtant, Audi entame une démarche de « downsizing » (réduction de la cylindrée) qui va entrainer le passage au V10 puis au V6 entre 2009 et 2011.

A compter de 2012, l’arrivée de l’hybridation va aboutir à des réductions de la cylindrée. Les objectifs d’économie de carburant, de poids et de place dans la voiture imposent des petits moteurs thermiques pour être couplés aux moteurs électriques. Le V12 est donc écarté au profit de la fée électrique… De même en GT, chez Ferrari, le V12 a disparu au profit du V8 dans les 458 Italia. Ainsi, depuis 2011, plus aucun moteur V12 n’a donné de la voix sur le circuit des 24 Heures du Mans…

PHOTOS : LE MANS (SARTHE, FRANCE), CIRCUIT DES 24 HEURES, 24 HEURES DU MANS 1939-2009 - DE HAUT EN BAS (D.R. / ARCHIVES) : La Peugeot 908 HDi FAP (n°9) est en 2009 le dernier prototype à moteur V12 victorieux aux 24 Heures ; cette Lagonda V12 (n°5) a terminé troisième en 1939 aux mains de Charles Brackenbury et Arthur Dobson ; en 1949, Luigi Chinetti (en cravate rayée au centre) a offert au moteur V12 sa première victoire avec la Ferrari 166 MM (n°22) ; on aperçoit les deux bancs de six cylindres sur le capot arrière de cette Matra (n°33), pilotée par Jean Guichet et Nino Vaccarella, cinquièmes en 1969 ; cette même année, la 917 (n°12) abritait sous son capot le premier moteur 12 cylindres de l'histoire de Porsche ; en 1988, le V12 atmosphérique de 7 litres de Jaguar (n°2) met un terme à la domination du 6 cylindres à plat turbocompressé de Porsche ; à l'origine conçu pour la McLaren F1 de route, le moteur V12 BMW s'impose également dans un prototype maison en 1999, avec au volant Yannick Dalmas, Pierluigi Martini et Joachim Winkelhock (n°15) ; en 2008, le V12 turbo diesel de l'Audi R10 TDI (n°2) signe sa troisième et dernière victoire consécutive.

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