CENTENAIRE DES 24 HEURES – DES MACHINES ET DES HOMMES ⎮ Dignes héritiers d’une légende du sport automobile venue d’Australie, Geoff et David Brabham ont affiché leur propre singularité en remportant les 24 Heures du Mans à seize ans d’intervalle pour le compte du même constructeur : Peugeot.
Bien avant que Geoff et David ne soient victorieux dans la Sarthe, leur nom figurait déjà au panthéon du sport automobile grâce à leur père. Trois fois sacré en Formule 1, Sir Jack Brabham (1926-2014), a tout d’abord été le premier champion du monde au volant d’une monoplace à moteur arrière (1959 et 60) avant d’être encore aujourd’hui le seul titré au volant d’une Formule 1 portant son nom (1966). A l’inverse, l’Australien ne compte que trois participations aux 24 Heures du Mans en 1957 (15e), 58 et 70 (abandons). Mais avant de prendre sa retraite sportive, c’est au volant d’un prototype Matra qu’il remporte sa dernière victoire internationale sur le circuit de Montlhéry lors des 1000 km de Paris 1970, associé à François Cevert.
Né en 1952, Geoff Brabham passe l’essentiel de sa carrière aux Etats-Unis. Côté monoplace, il compte dix participations aux 500 miles d’Indianapolis de 1981 à 1993, avec comme meilleur résultat une quatrième place en 1983. Parallèlement, il se construit un brillant palmarès dans le championnat d’endurance américain IMSA, avec quatre titres consécutifs de 1988 à 1991 sur Nissan. Pendant cette période faste, il dispute les 24 Heures du Mans avec le constructeur japonais en 1989 et 90, mais ces deux premières participations s’achèvent sur deux abandons.
1993-2009 : deux victoires, un triplé, un doublé
Son expérience n’échappe pas à l’oeil avisé de Jean Todt, à l’époque patron des activités sportives de Peugeot, qui l’associe en 1993 sur le prototype 905 à Christophe Bouchut et Eric Helary, deux jeunes Français qui découvrent la Sarthe.
Qualifié sixième, le trio s’installe sur le podium provisoire dès la quatrième heure de course, avant de prendre définitivement la tête peu avant quatre heures du matin. Au volant de la Peugeot 905 n°3 pour le dernier relais, Geoff Brabham reçoit le drapeau à damier de la victoire. Pour ses dernières 24 Heures du Mans, l’Australien et ses coéquipiers emmènent un superbe triplé de la marque au lion, complété par Thierry Boutsen/Yannick Dalmas/Teo Fabi (2e) et Philippe Alliot/Mauro Baldi/Jean-Pierre Jabouille (3e).
Alors que son grand frère monte sur la plus haute marche du podium en 1993, David Brabham, né en 1965, a déjà entamé un bail de près de deux décennies sur le circuit des 24 Heures, tout d’abord en tant que pilote d’usine Toyota pour sa première participation en 1992 (abandon).
Après une cinquième place en 1995 sur McLaren F1 GTR, il entame de 1997 à 2002 une longue collaboration avec Panoz et ses spectaculaires prototypes à moteur avant. En 2003, il rejoint Bentley et signe son premier podium au classement général, assurant le doublé du constructeur britannique derrière les vainqueurs Dindo Capello/Tom Kristensen/Guy Smith.
Par la suite, il accompagne le retour aux 24 Heures du Mans d'une autre légende britannique : Aston Martin. Deux victoires de catégorie au volant de la DBR9 en 2007 et 2008 lui valent de retrouver le volant d’un prototype pour les 24 Heures 2009 chez Peugeot, où il remplace Jacques Villeneuve.
Dans son duel avec Audi, entamé en 2007, le constructeur français domine cette 77e édition. Tout d’abord avec la 908 HDi FAP n°8 de Sébastien Bourdais/Franck Montagny/Stéphane Sarrazin, partie de la pole position. Peu après 20 heures le samedi, cette dernière connaît un problème technique et la n°9 de David Brabham/Marc Gené/Alex Wurz prend la tête pour ne plus la quitter. David Brabham rejoint son frère Geoff non seulement au palmarès des 24 Heures du Mans, mais aussi de l’endurance américaine, avec deux titres d’affilée en American Le Mans Series en 2009 et 2010. En 2012, il boucle ses dernières 24 Heures en sixième position, associé sur Honda HPD au britannique Peter Dumbreck et à l’indien Karun Chandhok.
La dynastie Brabham cumule 25 participations aux 24 Heures du Mans : trois chacun pour Sir Jack et Geoff, dix-huit pour David et une pour Gary, le troisième frère, né en 1961. S’ils n’ont jamais partagé le volant de la même voiture aux 24 Heures du Mans, Geoff et David Brabham ont constitué la seule fratrie victorieuse de l’histoire des 1000 km de Bathurst, la plus célèbre des courses australiennes de voitures de tourisme, qu’ils ont remportée ensemble en 1997 sur BMW.
Ces dernières années, après un long combat juridique, David Brabham a récupéré la propriété intellectuelle du patronyme familial. Il a ainsi pu relancer des activités de constructeur, tout d’abord par une grosse campagne de financement participatif, puis avec une GT sportive à moteur central baptisée BT62. Présentée en 2018, elle est suivie en 2021 d’une version évoluée BT63, avec pour ambition une participation en Championnat du monde d’Endurance FIA et aux 24 Heures du Mans dans les années à venir.
PHOTOS : LE MANS (SARTHE, FRANCE), CIRCUIT DES 24 HEURES, 24 HEURES DU MANS 1993-2008-2009 - DE HAUT EN BAS (D.R. / ARCHIVES ACO) : Associé à Christophe Bouchut et Eric Helary (ici au volant), Geoff Brabham a offert en 1993 sa deuxième victoire consécutive à la Peugeot 905 ; en course, Geoff Brabham achève un relais, alors qu'Eric Helary est prêt à prendre le volant ; David Brabham (au centre) lors de la Parade des Pilotes des 24 Heures 2008 en compagnie de ses coéquipiers Antonio Garcia (au premier plan) et Darren Turner, un trio qui remportera cette année-là sa catégorie sur Aston Martin DBR9 ; un an plus tard, David Brabham (à droite) s'impose sur Peugeot 908 HDi FAP au classement général, associé à Marc Gené (à gauche) et Alex Wurz (au centre).