CENTENAIRE DES 24 HEURES – DES MACHINES ET DES HOMMES ⎮ Né en 2013, alors que les 24 Heures du Mans célébraient leurs 90 ans, le Hall of Fame s’est récemment enrichi de l’intronisation du quadruple vainqueur Sébastien Buemi, qui vient de rejoindre neuf autres anciens pilotes victorieux dans la Sarthe.
Mais avant toute chose, rappelons le principe du Hall of Fame. Principalement institué dans le monde du sport et de la musique, il honore des personnalités ayant connu des réussites majeures. Le terme français le plus proche pourrait être « galerie des illustres » ou encore « Panthéon ».
Le Hall of Fame a intronisé à la fois des anciens vainqueurs et des « doyens » des 24 Heures dans leur pays respectifs : le belge Freddy Rousselle (1927-2013, trois participations), l’américain Dick Thompson (1920-2014, six participations), le britannique Eric Thompson (1919-2015, sept participations), le franco-brésilien Hermano da Silva Ramos (né en 1925, quatre participations) ou encore le Japonais Kunimitsu Takahashi (1940-2022, huit participations).
Les dix anciens vainqueurs pensionnaires actuels du Hall of Fame affichent un impressionnant cumul de 49 victoires. Dans la mémoire collective des 24 Heures, ils sont pour la plupart associés à une marque : Audi pour Tom Kristensen, Frank Biela, Emanuele Pirro et Allan McNish (avec aussi Bentley pour le premier nommé), Porsche pour Jacky Ickx et Derek Bell, Ferrari pour Olivier Gendebien, Matra pour Henri Pescarolo, Toyota pour Sébastien Buemi… Et une exception : Yannick Dalmas, comme on va le voir par ailleurs, même si sa première victoire sarthoise en 1992 est aussi celle de Peugeot.
Tom Kristensen et Jacky Ickx : qui est « Monsieur Le Mans » ?
« Monsieur Le Mans » doit-il obligatoirement être le détenteur du record de victoires ? Lorsqu’il a délogé Jacky Ickx le 19 juin 2005 sous le drapeau à damier de la 73e édition des 24 Heures, Tom Kristensen a vite précisé que ce titre devait rester au pilote belge. Avec quinze victoire à eux deux, l’un et l’autre incarnent deux générations et presqu’un demi-siècle de la légende des 24 Heures du Mans, de la première participation de Jacky Ickx en 1966 à la dernière de Tom Kristensen en 2014. De quoi rester – et sans doute pour longtemps – au sommet du palmarès sarthois.
Tom Kristensen (né le 7 juillet 1967) – 18 participations aux 24 Heures du Mans de 1997 à 2014, 9 victoires (1997, 2000, 2001, 2002, 2003, 2004, 2005, 2008, 2013), 5 autres podiums.
Jacky Ickx (né le 1er janvier 1945) – 15 participations aux 24 Heures du Mans de 1966 à 1985, 6 victoires (1969, 1975, 1976, 1977, 1981, 1982), 3 autres podiums.
Derek Bell, le leader anglais
Pilote britannique le plus victorieux dans la Sarthe, Derek Bell incarne une certaine idée de la fidélité. Il forme tout d’abord avec Jacky Ickx l’un des duos majeurs de l’histoire des 24 Heures du Mans. En quatre participations communes, ils signent trois victoires. Puis Derek Bell s’impose de nouveau à deux reprises avec un équipage identique, en compagnie de l’Américain Al Holbert et l’Allemand Hans Joachim Stuck.
Derek Bell (né le 31 octobre 1941) – 26 participations aux 24 Heures du Mans de 1970 à 1996, 5 victoires (1975, 1981, 1982, 1986, 1987), 4 autres podiums.
Frank Biela et Emanuele Pirro, les associés
L’Allemand et l’Italien comptent cinq victoires chacun, qu’ils ont toutes remportées ensemble ! Tout comme Tom Kristensen, ils figurent parmi les pionniers de la saga victorieuse d’Audi, dès la première participation de la marque aux anneaux en 1999. C’est précisément aux côtés du recordman danois que Biela et Pirro signent leurs trois premières victoires, avant de s’adjuger leurs deux dernières en compagnie de l’Allemand Marko Werner. Les deux victoires de ce dernier trio sont également les premières de la technologie diesel aux 24 Heures du Mans.
Emanuele Pirro (né le 12 janvier 1962) – 13 participations aux 24 Heures du Mans de 1981 à 2010, 5 victoires (2000-2001-2002-2006-2007), 4 autres podiums.
Frank Biela (né le 2 août 1964) – 10 participations aux 24 Heures du Mans de 1999 à 2008, 5 victoires (2000, 2001, 2002, 2006, 2007), 2 autres podiums.
Olivier Gendebien, l’autre roi belge des 24 Heures
Grâce à Olivier Gendebien (de 1962 à 1980) puis à Jacky Ickx (de 1981 à 2004), la Belgique a détenu pendant plus de quatre décennies le record de victoires aux 24 Heures du Mans. Premier quadruple vainqueur de l’histoire, Olivier Gendebien a également constitué avec l’Américain Phil Hill le premier équipage trois fois victorieux dans la Sarthe. Après une première participation au volant d’une Porsche, il est encore aujourd’hui le pilote le plus victorieux aux 24 Heures au volant d’une Ferrari.
Olivier Gendebien (12 janvier 1924-2 octobre 1998) – 8 participations aux 24 Heures du Mans de 1955 à 1962, 4 victoires (1958, 1960, 1961, 1962), 1 autre podium.
Henri Pescarolo, la légende française
Henri Pescarolo est entré dans la légende des 24 Heures avant même sa première victoire, par une inoubliable chevauchée en panne d’essuie-glace dans la nuit pluvieuse de l’édition 1968. Ses quatre succès ont confirmé une cote d’amour toujours d’actualité auprès du public français, bien au-delà de sa place dans le livre d’or des 24 Heures, en tant que détenteur du record de participations et seul pilote français à avoir remporter la course trois fois de suite.
Henri Pescarolo (né le 25 septembre 1942) – 33 participations aux 24 Heures du Mans de 1966 à 1999, 4 victoires (1972, 1973, 1974, 1984).
Yannick Dalmas, l'éclectique
Référence incontestable de l’endurance des années 1990, Yannick Dalmas occupe une place unique dans le Hall of Fame, avec quatre victoires conquises au volant de quatre voitures différentes. Mais cette versatilité est tout autant une question de circonstances que la récompense d’un talent qui s’est véritablement épanoui sur le circuit des 24 Heures, et que de nombreux patrons d’écurie et constructeurs se sont vite arraché. Son expérience est aujourd’hui au service du Championnat du monde d’Endurance FIA, en tant que pilote conseiller.
Yannick Dalmas (né le 28 juillet 1961) – 12 participations aux 24 Heures du Mans de 1991 à 2002, 4 victoires (1992, 1994, 1995, 1999), 2 autres podiums.
Sébastien Buemi, le métronome suisse
A la fin des années 2000, aucun citoyen helvétique n’avait gagné les 24 Heures du Mans. De 2011 à 2022, soit en douze éditions, un pilote suisse est monté à huit reprises sur la plus haute marche du podium : dans l’ordre Marcel Fässler (trois victoires), Neel Jani (une) et Sébastien Buemi, nouvel entrant du Hall of Fame grâce à sa quatrième victoire en 2022. Déjà quadruple vainqueur à moins de 35 ans, il peut monter encore plus haut, si l’on considère que Tom Kristensen, Derek Bell, Emanuele Pirro, Frank Biela et Henri Pescarolo étaient tous largement quadragénaires lors de leur dernière victoire.
Sébastien Buemi (né le 31 octobre 1988) – 11 participations aux 24 Heures du Mans depuis 2012 (série en cours), 4 victoires (2018, 2019, 2020, 2022), 3 autres podiums.
Allan McNish, l’étincelant
Après une première victoire sur Porsche 911 GT1 en 1998, le pilote écossais rejoint rapidement Audi, où il se construit l’un des plus beaux palmarès de l’histoire de l’endurance, avec deux succès supplémentaires dans la Sarthe. Il devient aussi l’un des pilotes les plus populaires de la discipline, par un mélange d’humour, de charisme, de coups d’éclats en piste. Et aussi de quelques frayeurs, comme lors des 24 Heures 2011.
Allan McNish (né le 29 décembre 1969) – 14 participations aux 24 Heures du Mans de 1997 à 2013, 3 victoires (1998, 2008, 2013), 5 autres podiums.
PHOTOS (D.R. / ARCHIVES ACO) - DE HAUT EN BAS : le Président de l'ACO Pierre Fillon (à gauche) en compagnie de six anciens vainqueurs lors de la création du Hall of Fame en 2013, avec (de gauche à droite) Tom Kristensen, Derek Bell, Emanuele Pirro, Frank Biela, Yannick Dalmas et Henri Pescarolo ; Jacky Ickx détient également le record du nombre de pole positions aux 24 Heures du Mans (cinq, dont trois consécutives) ; Olivier Gendebien (à droite) en 1959, où il fut contraint à l'abandon aux 24 Heures du Mans ; Sébastien Buemi lors de son intronisation au Hall of Fame fin 2022 ; Allan McNish (à gauche) a pris sa retraite sportive fin 2013, après sa troisième victoire aux 24 Heures.