Gregor Fisken et les 24 Heures du Mans (1/2) : « mes premiers tours furent mémorables »
Pour Gregor Fisken, les 24 Heures du Mans se vivent dans toute leur richesse, qu’il s’agisse de la course elle-même ou de son patrimoine. Outre quatre participations en tant que pilote, Gregor Fisken est aussi une personnalité du monde des voitures de collection. Pour la première partie de cet entretien, il raconte ses souvenirs de pilote, et bien sûr de passionné, sur le circuit des 24 Heures.
Au fil de ses quatre départs dans la Sarthe, Gregor Fisken a piloté quatre voitures dans trois catégories différentes, alternant GT et prototypes LMP1 et LMP2 avec un plaisir toujours renouvelé. S’il a été contraint à l’abandon à l’issue de ses deux participations en prototypes, il eu l’occasion de mener la catégorie LMP2. C’est finalement en GT qu’il a eu le bonheur de recevoir le drapeau à damier sarthois, sur Porsche en 2004 et Aston Martin en 2007.
En tant qu’Ecossais, comment expliquez-vous qu’autant de grands pilotes de l’histoire des 24 Heures du Mans viennent de là-bas ?
« Les 24 Heures du Mans sont sans doute la plus grande des courses et séduit tout naturellement les plus grands pilotes de toutes nations, ce qui inclut bien sûr l’Ecosse ! Avec les succès de l’Ecurie Ecosse, victorieuse au Mans en 1956, les 24 Heures sont devenues encore plus célèbres là-bas. Cette fabuleuse victoire a continué à inspiré les générations suivantes de pilotes écossais qui ont voulu courir là-bas. »
Quelle fut votre toute première découverte des 24 Heures ? La télévision, les livres, les magazines ou autre chose ?
« J’ai découvert les 24 Heures du Mans grâce à la passion de mon père pour le sport automobile, en particulier pour Bentley et bien sûr les multiples victoires de la marque aux 24 Heures du Mans. Quand on pense à Bentley, on pense au Mans. La première fois que je suis allé au Mans, c’était assis à l’arrière de la Bentley 6 ½ litres de mon père, une expérience inoubliable ! En 1978, toute notre famille avait fait le voyage depuis l’Ecosse jusqu’au Mans avec le Bentley Drivers Club pour la célébration de la victoire de la marque aux 24 Heures 1928. Le circuit nous avait permis de faire des tours de parade avant la course et je me souviens que la première fois que nous sommes arrivés au Tertre Rouge en vue de la ligne droite des Hunaudières, mon jeune frère et moi nous accrochions à l’arrière et notre mère hurlait à mon père de ralentir ! Mais mon frère et moi lui criions d’aller plus vite ! A ce moment précis, j’ai su qu’il fallait que je pilote au Mans, et je me rendais à peine compte que de cette inspiration allait naître un rêve qui deviendrait un jour réalité ! »
"Je suis allé pour la première fois au Mans assis à l'arrière de la Bentley 6,5 litres de mon père, toute notre famille avait fait le voyage depuis l'Ecosse jusqu'au Mans."
Gregor Fisken
Comment en êtes-vous venu à disputer vos premières 24 Heures du Mans ?
« J’ai eu l’opportunité de piloter pour l’équipe américaine The Racers Group aux 12 Heures de Sebring, avec mon ami et coéquipier Ian Donaldson. Par l’intermédiaire de Kevin Buckler (propriétaire de The Racers Group, ndlr), j’ai eu la possibilité de faire équipe avec Lars Erik Nielsen pour piloter la voiture de The Racers Group aux 24 Heures du Mans 2004. Une expérience incroyable, comme vous pouvez l’imaginer ! »
Quels sont vos souvenirs de vos premiers tours sur le circuit des 24 Heures ?
« Ces premiers tours furent bien entendu une expérience mémorable ! Nous avions fait les essais du Mans en 2003, qui avaient permis à l’équipe de s’acclimater (il n’y avait pas eu de gros changement cette année-là). La piste correspondait à ce que j’espérais et attendais, même si, dans les virages rapides, j’ai été énormément surpris par la différence de vitesse entre notre Porsche et les prototypes. »
Comment s’est passée la transition entre la Porsche 911 et les prototypes LMP1 et LMP2 de Lola et Courage ?
« Cette transition entre la 911 et les prototypes LMP a été plutôt pointue. Par rapport à la Porsche, il m’a fallu un peu de temps pour m’habituer aux énormes appuis générés par les prototypes. Cela s’est particulièrement manifesté sur la manière dont on peut freiner tard dans une LMP et sur la vitesse que l’on peut prendre dans les virages Porsche. »
Quelles furent vos sensations par rapport à la Porsche 911 quand vous avez piloté l’Aston Martin ?
« Par rapport à la 911, l’Aston Martin donnait plutôt le sentiment d’être une sorte d’hybride entre un prototype LMP et une GT. L’Aston Martin générait un appui raisonnable dans les virages rapides, on pouvait freiner très tard par rapport à la Porsche. Il y a plus de bruit à quand on est dans l’Aston Martin, même si ce bruit était superbe quand on descendait les rapports sur ce fabuleux V12 ! De nombreux fans m’ont dit que la Porsche 911 produisait un son superbe, mais comme il s’agit d’un moteur arrière, ce son partait vers l’arrière ! »
Comment travailliez-vous avec vos coéquipiers, notamment avec Sam Hancock, avec qui vous avez disputé deux fois les 24 Heures ?
« J’ai toujours pensé avoir eu de la chance avec mes coéquipiers. J’ai beaucoup appris de Ian Donaldson, et les conseils de Sam Hancock m’ont été très précieux lorsque je suis passé en LMP2 puis en LMP1. Sam a une énorme expérience du Mans. En tant que professionnel et coach, il m’a énormément aidé à prendre confiance en LMP2 et LMP1. Il a très bien qualifié nos voitures et s’est toujours bien défendu lorsqu’il le fallait pendant les courses. J’ai également beaucoup apprécié Liz Halliday, qui a prouvé qu’elle pouvait se défendre aussi bien que les hommes. Son implication était extraordinaire et son exemple devrait encourager beaucoup de femmes à s’engager en sport automobile. Même si nous étions tous trois très déçus d’avoir dû renoncer sur un problème moteur en 2005, notre Lola a au moins quitté la course en tant que leader de la catégorie LMP2. »
Si l’on prend en compte le fait que vous avez terminé les 24 Heures à deux reprises au volant d’une GT, quel type de voiture semblerait le mieux vous convenir ? Un prototype ou une GT ?
« Si j’ai effectivement terminé deux fois les 24 Heures au volant d’une GT, je dirais que j’ai apprécié toutes les voitures que j’ai pilotées au Mans ! Mais ma préférée, sur celles que j’ai conduites là-bas, c’est la Lola LMP2. Nous n’avons certes pas terminé en 2005, mais Sam, Liz et moi-même menions la catégorie LMP2 et la Lola était absolument merveilleuse à piloter ! On pouvait freiner tard et ça allait vite dans les virages Porsche. En 2005, il faisait très chaud au Mans, alors, être au volant d’un prototype le soir, c’était le plus bel endroit au monde ! »
PHOTOS (D.R. / ARCHIVES ACO) : LE MANS (SARTHE, FRANCE), CIRCUIT DES 24 HEURES, 24 HEURES DU MANS - De haut en bas, les quatre voitures pilotées au Mans par Gregor Fisken : Porsche 911 GT3 R en 2004 (avec Lars Erik Nielsen et Ian Donaldson, 18e), Lola B05/40-AER LMP2 en 2005 (avec Liz Halliday et Sam Hancock, abandon), Courage LC70-Mugen LMP1 (avec Sam Hancock et Alexander Frei, abandon) en 2006, et Aston Martin DBR9 en 2007 (avec Patrick Bornhauser et Roland Bervillé, 29e).
Pour Gregor Fisken, les 24 Heures du Mans se vivent dans toute leurs richesse, qu’il s’agisse de la course et de son patrimoine. Outre quatre participations en tant que pilote, Gregor Fisken est aussi une personnalité reconnue du monde des voitures de collection. Dans la seconde partie de cet entretien, il évoque la...