Quatrième des cinq Champions du Monde de Formule 1 vainqueurs aux 24 Heures du Mans (avec Mike Hawthorn, Phil Hill, Jochen Rindt et Fernando Alonso), Graham Hill a été le plus assidu de ce club très exclusif, avec dix participations entre 1958 et 1972. Parallèlement, il se construit pendant cette période l'un des plus beaux palmarès de l'histoire du sport automobile.
Cette fabuleuse carrière a paradoxalement commencé sur le tard. Graham Hill obtient son permis de conduire en 1953. Il a alors 24 ans, âge où les jeunes pilotes de sa génération ont déjà aiguisé leur ambition en formules de promotion… et songez qu’au fil des années 2000, à ce même âge, Fernando Alonso, Sebastian Vettel, Lewis Hamilton ou encore Max Verstappen sont déjà champions du monde ! Il débute en compétition à l’approche de la trentaine en 1957, avant de découvrir à la fois la Formule 1 et les 24 Heures du Mans chez Lotus l’année suivante.
Les deux premiers joyaux de la couronne…
Après son premier titre mondial en F1 en 1962 chez BRM, il participe à l’aventure du prototype Rover-BRM à turbine pour deux éditions des 24 Heures du Mans. En 1963, elle court hors classement et Graham Hill est associé à Richie Ginther. En 1965, la Rover-BRM est officiellement classée en dixième position. Graham Hill en partage cette fois le volant avec Jackie Stewart. Dans l’intervalle, il décroche son premier podium manceau, avec en 1964 une deuxième place avec le Suédois Jo Bonnier sur une Ferrari engagée par Maranello Concessionaires, l’importateur de la marque outre-Manche.
Il est contraint à l’abandon sur Ford GT40 aux 24 Heures 1966, pour son avant-dernier départ sarthois. Trois semaines plus tôt, le 30 mai, il remporte la 50e édition des 500 miles d’Indianapolis, pour sa première participation à la grande classique américaine de la monoplace sur circuit ovale. En 1968, il décroche son deuxième titre mondial en Formule 1, portant sur ses épaules la douleur d’une équipe Lotus orpheline de son pilote fétiche Jim Clark, décédé en avril lors d’une course de Formule 2. En 1969, il devient « Mister Monaco » en établissant un record de cinq victoires dans le Grand Prix monégasque (1963-64-65-68-69) qui tiendra près d'un quart de siècle, avant d'être battu en 1993 par Ayrton Senna.
Le Mans 1972, la victoire ultime
Après ces six années d’absence bien remplies, Graham Hill fait son retour au Mans en 1972 chez Matra, avec pour coéquipier Henri Pescarolo. Le duo franco-britannique sort vainqueur d'un superbe duel avec la voiture de leurs compagnons d'écurie François Cevert et Howden Ganley, handicapée en fin de course par une collision avec une GT.
Henri Pescarolo a salué la constance du Britannique, qui a joué un rôle non négligeable dans la première des trois victoires sarthoises de Matra : « Compte tenu de son âge (Graham Hill avait 43 ans en 1972, ndlr), je pensais qu'il ne serait pas disposé à prendre des risques. Non seulement j'ai découvert un personnage hors du commun, mais c'est précisément lui qui a fait la différence pour la victoire sous la pluie, pendant la nuit. » Cette victoire sarthoise fait de Graham Hill le seul détenteur de ce qu’on a pris coutume d’appeler la Triple Couronne du sport automobile, avec dans l'ordre le titre mondial en Formule 1, les 500 miles d'Indianapolis et les 24 Heures du Mans.
Lorsqu'il prend sa retraite de pilote fin 1975, il est également recordman des participations en Formule 1 avec 176 Grands Prix répartis sur 18 saisons, record battu par la suite par Riccardo Patrese, Rubens Barrichello Kimi Räikkönen et Fernando Alonso. Il compte s'occuper à plein temps de l'écurie de Formule 1 qu'il a créée en 1973, mais trouve la mort dans un accident d'avion le 29 novembre 1975.
Depuis la disparition de Graham Hill, plusieurs pilotes ont tenté le pari de la Triple Couronne. Champions du monde en Formule 1 et vainqueurs à Indianapolis, Mario Andretti et Jacques Villeneuve s’en sont approchés en terminant sur la deuxième marche du podium des 24 Heures, respectivement en 1995 et 2008. Le double champion du monde F1 Fernando Alonso a remporté les 24 Heures 2018 et 2019, mais court encore après la victoire aux 500 miles, qu’il a disputés en 2017 et 2020. Pour l’instant, le triple exploit du roi Graham Hill est donc toujours inégalé.
PHOTOS : LE MANS (SARTHE, FRANCE), CIRCUIT DES 24 HEURES, 24 HEURES DU MANS - DE HAUT EN BAS (D.R. / ARCHIVES ACO) : La solidité de Graham Hill sous la pluie a grandement contribué à la victoire de Matra (n°15) aux 24 Heures 1972 ; la Rover-BRM (n°31) de 1965 vue des tribunes ; en 1966, Graham Hill et son fameux casque au couleurs du club d'aviron London Rowing Club partageaient le volant d'une Ford GT40 (n°7) avec l'Australien Brian Muir.