24h Le Mans
L’Hypercar constitue la catégorie reine, celle dans laquelle les concurrents peuvent prétendre à la victoire au général. Seize Hypercars représentant sept constructeurs sont prêtes à relever le défi. Mais, au fait, ces Hypercars, peuvent-elles rouler sur la route comme votre voiture ?
Les 24 Heures du Mans fêtent leurs 100 ans. Cent ans d’innovations, de recherches et d’évolutions, qui ont largement profité aux véhicules que nous utilisons dans nos déplacements. Car, depuis les origines de l’épreuve, un vrai lien existe entre les voitures engagées et celles vendues dans le commerce pour un usage 100% routier. L’édition du Centenaire poursuit cette tradition.
En « Sport » ou « Grand Tourisme » jadis, on a vu depuis un siècle des voitures de route adaptées à la course. Les GTE de 2023 en sont les héritières. Elles dérivent directement de sportives qu’il est possible de trouver dans les concessions Aston Martin, Corvette, Ferrari et Porsche.
Les « sport-prototypes » et « LMP » d’antan, dont les Hypercars sont les descendantes, ont elles aussi permis de développer des technologies déclinées ensuite pour la route, mais avec une approche plus radicale. Une Hypercar est pensée dès le premier coup de crayon pour la compétition, pas pour la route. Elle nécessite bien des aménagements pour pouvoir prétendre à rouler légalement et « presque » normalement sur la voie publique.
Presque, car autant le dire d’emblée, une voiture de course aussi complexe et innovante qu'une Hypercar n’est pas conçue pour un usage quotidien et serait un calvaire pour aller faire des courses, se rendre au travail ou récupérer les enfants. Une Ferrari 499P ou une Porsche 963 ne feraient pas une bonne auto du quotidien. Pourquoi ? Les raisons sont nombreuses. Entre la hauteur de caisse réduite à quelques centimètres, l’angle de braquage peu adapté à la ville, la position de pilotage très basse ou encore le bruit… le terrain de jeu d’une Hypercar, c’est le circuit ! Mais ces prototypes ont tout de même beaucoup de points communs avec nos autos. Éclairage, essuie-glaces, éléments de signalisation ou éléments mécaniques sont souvent proches. Le règlement Hypercar autorise aussi les constructeurs à personnaliser les voitures d’un point de vue esthétique, par exemple en reprenant des éléments de style sur la face avant. Les Peugeot 9X8 traduisent bien ce lien avec la gamme actuelle du constructeur français, avec leurs « griffes ». Ferrari aussi, avec ses 499P, reprend à merveille des traits de ses 296 ou Daytona SP3.
Les Hypercars sont donc vouées à rester dans l'enceinte des circuits. Toutes ? Non ! Une poignée d’irréductibles constructeurs résiste encore et toujours à cette idée, et propose des versions routières de leurs Hypercars. Ces constructeurs, ce sont Glickenhaus et Vanwall. Le premier avec sa SCG 007 LMH, devenue Glickenhaus 007, que l’on peut acheter en version routière sous le nom de SCG007LMH/S. Chez Vanwall aussi, la Vanderwell 680 est développée en version homologuée pour la route. Elle prend alors le nom de Vanwall Vandervell 1000, avec plus de 1000 chevaux disponibles sous le capot arrière.
Deux exemples – que rien n’empêche les autres constructeurs d’imiter – qui s’inscrivent dans la tradition des GT1 et autres GTP des années 90 et 2000. Les McLaren F1 GTR, Mercedes CLK-GTR, Porsche 911 GT1 et Toyota GT-One avaient, toutes, au moins un exemplaire routier. Il s'agissait à l'époque d'une obligation légale pour homologuer le modèle.
Et qui sait, demain peut-être, lorsqu’elles seront retirées de la compétition, certaines Hypercars seront peut-être converties en voitures pour la route par leur nouveau propriétaire. Vous ne me croyez pas ? Pourtant, des précédents existent ! Plusieurs McLaren F1 GTR sont immatriculées et circulent de nos jours, en Angleterre et aux États-Unis. Des Porsche 917 ou 962 « road legal » existent aussi, avec parfois un simple changement de jantes et de pneumatiques pour mieux encaisser le revêtement plus cassant que celui de la piste. Demain, une 963 de route ou une Cadillac V-Series.R homologuées, cela vous fait rêver ?
Avant de croiser une Hypercar sur la route, il faudra faire preuve de patience. En revanche, leur ADN est déjà là, dans nos rues. En effet, Le Mans permet aux constructeurs, motoristes et équipementiers de se servir de l’exigence de la course pour éprouver des innovations avant de les proposer sur nos voitures. En venant défier le Tertre Rouge, les Hunaudières, Indianapolis ou les virages Porsche, les constructeurs essaient certaines pièces que l’on retrouvera demain sur des véhicules de série.
Depuis un peu plus de 10 ans (2012) c’est par exemple la technologie hybride qui est testée et validée dans des conditions extrêmes, 24 heures durant. Audi, Porsche et Toyota – dont les gammes sont largement électrifiées aujourd’hui – ont appris au Mans à pousser l’hybride dans ses retranchements.
En 2023, ce lien existe plus encore. Cadillac a par exemple décidé de nommer son Hypercar V-Series.R pour affirmer le lien avec la gamme actuelle et le badge V-Series, lancé en 2004. « Tous les véhicules V-Series bénéficient des technologies, de la performance et des enseignements tirés depuis près de 20 ans avec nos victoires sur les circuits. Notre équipe de course apporte un vrai souci du détail qui se retrouve dans chaque modèle de production » explique Brandon Vivian, ingénieur en chef exécutif de Cadillac.
Autre exemple avec Peugeot. La 9X8 est elle aussi une voiture hybride, comme certains modèles de la gamme. Le plus proche dans la philosophie est sans doute la 508 PSE, pour Peugeot Sport Engineered. Peugeot propose avec sa berline – également déclinée en break SW – de découvrir « les sensations de la haute performance à faible émission ». Les 508 PSE et 508 SW PSE sont proches de la 9X8. La preuve, l’Hypercar est dans la gamme du constructeur sur son site officiel (cliquez sur la fiche de la 508 PSE et choisissez ensuite en haut "Nos modèles" pour la voir, intégrée au catalogue). Un clin d’œil amusant qui prouve que si les Hypercars ne sont pas vouées à rouler sur nos routes, leur technologie, leur philosophie et leurs innovations nous concernent tous.
