Certes le châssis DBR1/1 présenté n'a remporté qu'une seule épreuve au cours de sa carrière, qui s'étale entre 1956 et 1962, mais avec Sir Stirling Moss derrière le volant. Victorieux des 1 000 km du Nürburgring en 1958 avec l'une des voitures sœurs, le Britannique a convaincu David Brown, le propriétaire d'Aston Martin (le DB des voitures), qu'il pouvait réitérer son exploit l'année suivante. Pari relevé ! Et avec panache ! Ne laissant le volant à son coéquipier Jack Fairman que pour huit petits tours (ce qui est relatif sur la Nordschleife), Sir Stirling Moss bat le record du tour à… 16 reprises au cours de ce qui sera l'ultime course de la DBR1/1 sous les couleurs officielles du constructeur de Gaydon.
Certes Sir Stirling Moss et le triple Champion du Monde de F1 Sir Jack Brabham se sont glissés dans le baquet de la DBR1/1 une seule fois, mais c'était la voiture attitrée de Roy Salvadori, qui s'imposera aux 24 Heures du Mans en 1959 avec le châssis DBR1/2, assisté de Caroll Shelby, comme aux 12 Heures de Sebring 1958 et 1959 (abandon), mais cette fois avec la DBR1/1.
Certes l'Aston Martin DBR1/1 totalise six abandons sur 16 courses, mais elle compte cinq deuxième places et un meilleur tour. En 2010, Brian Redman en a pris le volant à Goodwood et en 2013, Sir Stirling Moss a retrouvé la voiture au Nürburgring, sur le lieu de l'un de ses exploits, lors des célébrations du centenaire d'Aston Martin.
Certes l'équipage de la belle Anglaise a été contraint à l'abandon à trois reprises, en autant d'apparitions, aux 24 Heures du Mans entre 1956 et 1958, mais elle a ouvert la voie au magnifique doublé de l'Aston Martin DBR1 dans la Sarthe en 1959, Maurice Trintignant et Paul Frère montant sur la deuxième marche du podium avec la DBR1/4.
Certes la DBR1/1 ne possède pas le palmarès de la DBR1/2, mais le succès des monts de l'Eifel a contribué à l'unique titre qu'Aston Martin, victorieux à l'issue de trois des cinq manches au calendrier, a décroché en Championnat du Monde des Voitures de Sport en 1959. Et de grands pilotes, à commencer par Tony Brooks et Reg Parnell, qui l'ont fait débuter au Mans en 1956, en ont pris le volant, à l'image de Bruce McLaren, futur lauréat des 24 Heures du Mans en 1966, aux 1 000 km du Nürburgring, assisté par Jim Clark en 1961 (abandon) et par Tony Maggs (4e) l'année suivante, sous les couleurs d'Essex Racing Stable.
Certes le moteur de la DBR1/1 n'est pas d'origine puisque son propriétaire actuel souhaitant participer au Goodwood Revival, l'a remplacé par une copie, mais la voiture est mise en vente avec le moteur de l'époque, sans doute trop fragile pour rugir à nouveau en piste.
Bref, la valeur historique de l'Aston Martin DBR1/1 qui a quelque part permis à David Brown de réaliser son rêve de s'adjuger le trophée des 24 Heures du Mans est inestimable, ce qui explique l'estimation par RM Sothebys supérieure à 20 millions de dollars (environ 17 millions d'euros). Cet après-midi, elle pourrait devenir l'Aston Martin la plus chère jamais vendue…
Photo (D.R. Archives ACO) : L'Aston Martin DBR1 n°14 en pleine action sous la pluie aux 24 Heures du Mans 1956.