Romain Dumas n'en finit plus de battre des records. Après Pikes Peak, la semaine suivant la 86e édition des 24 Heures du Mans, c'est à Goodwood, lors du Festival of Speed, le week-end dernier que l'Alésien a effacé des tablettes la marque précédente réalisée par une voiture électrique (lire Dumas bat le record en électrique à Goodwood) avec la Volkswagen I.D. R. Pourtant la performance n'est pas aussi simple qu'il y paraît, surtout dans le Colorado.
"Tout d'abord, contrairement à l'endurance, le pilote est seul à bord, commence Romain Dumas. Certes, on n'a pas à faire de compromis entre les préférences de réglages des uns et des autres, mais toute la pression repose sur les épaules d'un seul homme. Et la pression est énorme sur une épreuve comme Pikes Peak car il n'y a qu'une seule tentative. Toute sortie de piste est rédhibitoire. Au Mans, si on passe du temps dans les stands, on perd la course, surtout dans une catégorie aussi relevée que le LMGTE Pro, mais on garde des chances d'aller au bout. A Pikes Peak, c'est fini."
Cette mésaventure est arrivée au pilote français lors de l'édition 2013 au cours de laquelle Sébastien Loeb avait pulvérisé le record avec sa Peugeot 208 T16 : une casse mécanique avait mis fin à tout espoir quelques centaines de mètres après le départ. A l'époque, Romain Dumas engageait sa propre voiture avec sa structure privée alors que cette année, il pouvait compter sur le soutien de Volkswagen, marque qui appartient au même groupe que son employeur Porsche avec lequel il a disputé la 86e édition des 24 Heures du Mans.
"Pikes Peak s'est beaucoup mieux passé que les 24 Heures du Mans cette année, poursuit Romain Dumas. L'un de mes coéquipiers ayant bien abimé la voiture aux essais, les mécaniciens ont dû changer la coque et pendant la course, un support de suspension s'est arraché, ce qui nous a contraints à l'abandon. J'avais donc à cœur de réaliser quelque chose de bien dans le Colorado pour oublier. De toute façon, comme on n'a qu'une seule chance, quand on est au volant il faut être concentré à 100% et on ne peut penser à rien d'autre."
Photos ci-dessus : Romain Dumas près de la Porsche 917K au Mans Classic 2018 / La Porsche 911 RSR n°94 de Romain Dumas aux 24 Heures du Mans 2018 / La Volkswagen I.D. R lors de la victoire de Pikes Peak en juin 2018.
La concentration est aussi importante dans la Sarthe, mais entre un tour de circuit de 13,626 km bouclé plusieurs centaines de fois en 24 heures et une montée de près de 20 km avec 156 virages à parcourir une seule fois, le défi est "complètement différent. Lors des essais, le tracé est coupé en trois sections et on ne parcourt jamais la totalité du parcours avant le jour J."
Pour schématiser, c'est un peu comme si la piste des 24 Heures du Mans était découpée en trois et que les pilotes ne découvraient l'intégralité du tracé que le jour de la course. Pas simple lorsqu'il faut être à fond ! D'autant qu'à Pikes Peak, deux difficultés supplémentaires attendent les concurrents : la raréfaction de l'oxygène, avec une ligne d'arrivée située à environ 4 300 mètres, et la présence de précipices en lieu et place des barrières de sécurité qui entourent le grand circuit des 24 heures. "J'avoue que je me suis parfois fait peur, notamment lorsque j'ai glissé dans une épingle, ajoute le Gardois. La piste était humide et en plus, il y avait du brouillard dans la deuxième section. Dans ces conditions, le seul adversaire du pilote, c'est le pilote lui-même. On se bat contre le chronomètre. J'ai perdu du temps, mais je voulais vraiment aller chercher le record."
Mission accomplie en 7'57"148 ! Avec les félicitations de Sébastien Loeb lui-même lorsque les deux pilotes se sont retrouvés lors d'une confrontation amicale, en compagnie de Loïc Duval, sur la piste de karting mancelle en marge du Mans Classic le 7 juillet dernier (lire Quand Duval, Dumas et Loeb découvrent le complexe de karting du Mans)…
Photo : Romain Dumas lors des 24 Heures du Mans 2018.