24h Le Mans
La bataille des constructeurs I Porsche est le constructeur qui compte le plus de victoires aux 24 Heures du Mans avec 19 succès, devant Audi (13) et Ferrari (10). Cette histoire riche, étirée depuis le premier succès en 1970 jusqu’à la victoire la plus récente décrochée en 2017 (Porsche 919 Hybrid #2 de Timo Bernhard, Earl Bamber et Brendon Hartley) témoigne de la fidélité du constructeur et surtout de sa constance dans le temps. Un 20e triomphe est-il possible dimanche ?
Lors de l’édition du Centenaire, derrière la lutte de haute intensité entre Ferrari et Toyota, Porsche était un peu en retrait. Les trois 963 officielles alors engagées connaissaient des débuts compliqués : la #5, 17e, était la mieux classée, devant la #6, 22e, la #75 ayant abandonné. La 963 privée de l’équipe Jota, qui ne prenait alors part qu’à sa deuxième course, était la dernière classée en passant le damier, 40e.
Un résultat décevant, pas vraiment à la hauteur de la réputation du constructeur. Des problèmes récurrents dans le circuit de refroidissement, notamment, expliquaient cette première expérience ratée pour la LMDh de Flacht (en Allemagne, où se situe le Porsche Motorsport Centre). Mais 12 mois plus tard, tout est différent. Tout indique que les 963 seront dans la lutte pour la victoire. Grâce à la performance en piste des voitures et aussi au ressenti des pilotes, bien plus confiants qu’en 2023.
Depuis le début de saison en Championnat du monde d’endurance, Porsche est la référence. Après la victoire des 1812 km du Qatar pour Kévin Estre, André Lotterer et Laurens Vanthoor sur la 963 #6, le trio a enchaîné avec des deuxièmes places à Imola puis Spa-Francorchamps. De quoi arriver en Sarthe en tête du classement pilotes et constructeurs ! Aux États-Unis, le constat est le même : Matt Campbell, Josef Newgarden, Dane Cameron et Felipe Nasr ont brillé aux 24 Heures de Daytona en janvier. Les deux derniers nommés sont en tête du WeatherTech SportsCar Championship, et Porsche est aux commandes côté constructeurs.
Et quand ce n’est pas une voiture officielle qui gagne, les 963 privées se montrent ! La #12 du Team Jota de Will Stevens et Callum Ilott a ainsi enlevé les 6 Heures de Spa-Francorchamps, ultime répétition avant Le Mans. Et la #99 de Proton Competition, avec Neel Jani et Julien Andlauer, était aussi très en vue. Une « double menace » qui vient des voitures officielles et privées, avec au total six 963 au sein de la liste des engagés, toutes capables de l’emporter.
Non seulement les Porsche 963 ont « cassé » la série de victoires des Toyota GR010 Hybrid en WEC (les machines japonaises ont gagné toutes les courses en 2023, sauf Le Mans) mais l’Hypercar allemande est aussi capable de briller… sur une durée de 24 heures !
Alors, quel a été le déclic ? Dans quels domaines les Hypercars allemandes ont le plus progressé pour parvenir à trouver fiabilité et performance ? « Nous avons fait évoluer de petites choses au fur et à mesure, course après course. On se bat moins avec la voiture que par le passé, explique Mathieu Jaminet, pilote de la #4. L’année dernière, il y a eu pas mal de sorties de pistes des 963 pendant la saison, car la voiture était sur un fil tout le temps. Nous avons progressé dans tous les compartiments. » Frédéric Makowiecki (Porsche 963 #5) en dit un peu plus: « L’équilibre de la voiture est plus linéaire, elle est plus prévisible. Lorsque la voiture est instable (comme c’était le cas au cours de la saison 2023, ndlr), on essaye de corriger, au détriment de la performance. En revanche, quand la balance est contrôlée, on peut aller chercher plus de vitesse ».
En bord de piste, on le voit, les 963 ont progressé sur la phase combinée, avec de meilleures entrées et sorties de virages. Plus simple à emmener, plus rapide, plus fiable. La 963 est-elle la favorite ?
À écouter les pilotes, aucun ne se sent souverain. Comme chez Toyota (premier constructeur à avoir engagé une hypercar) ou Ferrari (vainqueur sortant), on refuse ce titre de favori au trône. Pourtant, devant les arguments solides affichés par Porsche, on pourrait croire la victoire assurée. Mais Le Mans reste Le Mans, par la spécificité de son tracé, et le défi humain et mécanique unique que constitue la course. On ressent l’humilité des pilotes face au monument qui les attend.
« Je ne dirais pas que nous sommes les favoris, explique Michael Christensen. Depuis le début de saison, nous nous débrouillons plutôt bien. Avec la #6 ils sont réguliers et arrivent à avoir des résultats. Sur la #5 nous sommes un peu plus malchanceux. Mais, au Mans, tout est différent. Il y a de grandes lignes droites, des vitesses très élevées. Nous devons selon moi regarder ce qui s'est passé l’an dernier pour trouver une comparaison, plutôt que de se fier au début de saison. »
Pas d’excès de confiance, mais les premiers résultats sont là. Lors de la Journée Test, deux 963 ont terminé en tête, avec Kévin Estre décrochant le meilleur tour en 3’26’’907. « Notre voiture a fonctionné comme dans un rêve dès le premier tour et j'ai tout de suite eu de bonnes sensations », a expliqué le Français dimanche.
L’application visible dans les garages des mécaniciens, techniciens et ingénieurs ainsi que l’approche sérieuse que l’on connaît des pilotes qui font partie des rangs Porsche – qu'ils courent pour l’équipe officielle ou les structures privées – laisse entrevoir le meilleur. Mais il reste, encore, 24 heures d’effort.
La bataille des constructeurs est lancée. Verdict en piste à partir de 16 heures, samedi 15 juin. Elle sera d'ailleurs le thème du Show des 24 Heures du Mans, dont pourront profiter tous les spectateurs de cette 92e édition à partir de 23 h 30. Le duo Synapson va mixer sur ce son et lumière immersif, s’appuyant à nouveau sur pyrotechnie, drones, vidéo et conception lumière.
