Photo : Nissan
Lancé au début de l’année 1991, tandis que les voitures de la catégorie « Sports 3,5 Litres » aspirent à devenir les références absolues, le projet « P35 » de Nissan est déterminant. La future auto du constructeur de Yokohama devra ainsi endosser le costume, cintré, de vitrine technologique dans la continuité des différentes campagnes menées précédemment en IMSA, au Japon, en Championnat du Monde et aux 24 Heures du Mans. Avec succès mais aussi parfois quelques désillusions, les R89, R90, GTP ZX-Turbo ou encore NPT-90 ont ainsi porté haut les couleurs de Nissan dans le monde entier, à la fin des années 90, et cette prometteuse P35 doit en être la digne héritière.
Pour mener à bien son projet, Nissan Motorsport missionne deux entités aux compétences et à la culture bien différentes. Tandis que Nismo conçoit un nouveau moteur, Nissan Performance Technology Inc (NPTI) travaille sur le châssis et l’architecture de l’auto. En adéquation avec le règlement du Championnat du Monde des Sport-Prototypes, les ingénieurs et techniciens de Nismo créent un V12, 3,5L développant 630ch au banc d’essais et répondant au patronyme interne de VRT35. Trois voitures sont assemblées aux Etats-Unis, dans les locaux californiens de NPTI et plusieurs séances d’essais sont organisées afin de rendre cette nouveauté performante. Car, à l’heure où Johnny O’Connell presse le bouton de contact de sa P35 encore vierge de décoration, sur la piste d’essais de Carlsbad courant 1991, la concurrence s’annonce redoutable l’autre côté de l’Atlantique. Ce shakedown effectué, les essais se poursuivent avec détermination, notamment sur les circuits de Mid-Ohio, Daytona et au Firebird Raceway de Phoenix.
Parallèlement à l’équipe nord-américaine de Nissan Performance Technology Inc, une autre cellule est à pied d’œuvre dans le bureau d’études de Nismo. Au pays du soleil levant, le département compétition de Nissan planche sur une version différente de la P35, destinée au Championnat du Japon des Sport-Prototypes. Ce dernier permettant aux Sports 3,5L de concourir localement, la base de cette variante s’établie autour de la P35. Si le moteur est le même 12 cylindres, la plus importante modification concerne la plateforme même de l’auto. Tandis que le châssis de la version « US » du prototype utilise deux matériaux, le carbone et l’aluminium, la NP35 (version nippone) est quant à elle assemblée sur un élément entièrement en carbone. Par ailleurs, la configuration aérodynamique s’avère sensiblement différente pour notamment répondre aux spécifications des circuits japonais où l’appui est une donnée primordiale.
Malheureusement pour les hommes qui ont œuvré à ce projet, les difficultés financières qui fragilisent Nissan à cette période ont raison de l’aventure P35. Alors que les pilotes sont annoncés, Johnny O’Connell, Geoff Brabham, Arie Lyendyk, Bob Earl et James Weaver, et que des travaux en soufflerie ont encore lieu, le programme de développement s’arrête instantanément en 1992. De ce projet d’envergure, internationale et ambitieux, l’arme de Nissan ne prendra part qu’à une seule course, anecdotique. En clôture de la saison 1992 du Championnat du Japon des Sport-Prototypes, une NP35 est alignée en compétition lors des 500 Kilomètres de Mine. La voiture, n°23, est pilotée par Toshio Suzuki et Jeff Krosnoff et la prestation proposée se situe à des encablures de la Toyota TS010 de Geoff Lees et Jan Lammers, vainqueurs devant une… Nissan : Une robuste et conservatrice R91CK.
Pierre-Yves Riom / ACO