Impressionnante et inéducable, la montée en puissance des voitures de la catégorie GT1 fut la plus importante transition qu’ait connue l’endurance durant la seconde moitié des années 90. Les nostalgiques de cette époque se souviennent sans doute des Porsche 911 GT1, McLaren F1 GTR, Mercedes CLK-GTR ou bien encore Panoz GTR-1. Plus confidentielle bien que tout autant superlative, la Lotus Elise GT1 assuma ce rôle nécessaire d’alternative à certains modèles proposés alors aux écuries privées.

Icone du renouveau de Lotus, l’Elise est la digne héritière du modèle Elan, commercialisé dans les années 60. Galvanisés par un succès commercial indéniable, les responsables de Lotus décident d’optimiser la présence du constructeur de Hethel (Angleterre) en compétition et notamment en endurance. Ainsi, sans grande surprise, le programme basé sur l’Esprit GT1 est abandonné au profit d’une nouvelle étude articulée autour de l’Elise dont la base est plus moderne mais aussi l’image plus vendeuse, commercialement. De ce fait, une carrosserie en fibre de carbone et un châssis allongé de quinze centimètres dans sa partie arrière transforment considérablement la Lotus Elise dont les mensurations ont explosé. Bien trop frêle pour propulser une telle machine dans la ligne droite des Hunaudières, le petit 4 cylindres du modèle de série est initialement remplacé par le V8 3,5L de l’Esprit GT1 de 1996, avant qu’un bloc V8 Chevrolet 6,0L soit finalement installé dans le berceau de la belle anglaise.

Sept Lotus Elise GT1 sont officiellement assemblées dans les ateliers britanniques. Les débuts en compétition, de celle qui incarne le regain de forme de Lotus sur le marché des voitures de sport, ont lieu lors des 4 Heures d’Hockenheim, manche d’ouverture du Championnat FIA GT 1997. Les premiers pas sont difficiles puisque les quatre voitures présentes, trois alignées par GT1 Lotus Racing Giroix et une par le GBF UK Limited, abandonnent lors de cette première sortie.

Au Mans, les Lotus Elise font connaissance avec le circuit des 24 Heures lors des essais préqualificatifs organisés les 3 et 4 mai 1997. Trois châssis, officiellement exploités, sont alors dépêchés dans la Sarthe : la voiture n°49 est pilotée par Jan Lammers et Mike Hezemans, la n°50 par Jean-Denis Delétraz et Fabien Giroix tandis que la n°51 est confiée à l’éclectique équipage Maurizio Sandro Sala, Ratanakul Prutirat et Kasikam Suphot. Bien que ce roulage soit des plus studieux, beaucoup d’incertitudes planent encore sur la faculté des Elise GT1 à tenir la cadence sur une course aussi intraitable que les 24 Heures du Mans. À l’entame de la grande semaine mancelle, deux autos sont finalement présentées aux commissaires pour les vérifications techniques et administratives.

Si l’équipage franco-suisse de la n°50 reste inchangé, Alexander Grau complète celui de la n°49 aux cotés de Lammers et Hezemans. Pour ces derniers, les essais libres et qualificatifs se révèlent particulièrement encourageants dans la mesure où Jan Lammers se dit satisfait du comportement de sa voiture et signe une meilleur tour en 3’48’’395, non loin de la meilleure performance en catégorie GT1 de la Porsche de Wollek/Stuck/Boutsen, en 3’43’’363. En revanche, les mines sont fermées dans le box de la voiture sœur n°50 de Jean-Denis Delétraz et Fabien Giroix qui échouent à l’exercice des qualifications pour une petite mais cruelle seconde. Il n’y aura donc qu’une seule Elise GT1 au départ de la 65e édition des 24 Heures du Mans.

Le début de course est prudent mais efficace. Une lente mais constante remontée dans le classement est opérée depuis la 26e place de la grille de départ. 25e à 18 heures puis 17e à 20 heures enfin 15e à minuit, le trio Lammers/Hezemans/Grau progresse régulièrement avant qu’une fuite d’huile ne condamne leur avancée au petit matin. Comme les mésaventures du début de saison pouvaient le laisser présager, la fiabilité ne sera malheureusement pas au rendez de la seule apparition d’une Lotus Elise GT1 aux 24 Heures du Mans.

La saison FIA GT se poursuit toutefois pour l’équipe officielle GT1 Lotus Racing Giroix ainsi que le GBF UK Limited sans qu’un réel résultat significatif soit enregistré. Prenant conscience de l’importance des moyens à mettre en œuvre pour envisager concurrencer les Mercedes, Porsche et McLaren, dont les performances s’envolent, les décideurs de Lotus annoncent la fin du programme et du développement de l’Elise GT1.

Dans la Sarthe, la célèbre marque anglaise y effectuera son retour en Grand-Tourisme en 2011 avec le modèle Evora GTE ainsi qu’en prototype avec la T128 (LM P2) en 2013.

Pierre-Yves RIOM / ACO