Après avoir marqué l’histoire des 24 Heures du Mans en devenant le premier pilote quadri amputé à rallier l’arrivée de la course, Frédéric Sausset compte bien ouvrir une nouvelle voie en alignant un équipage composé de deux pilotes en situation de handicap dans la catégorie Innovative Car. Grâce à l’invitation de l’ACO, cette première mondiale aurait dû avoir lieu en 2020 mais a été reportée d’une année en raison de la crise sanitaire. « L’état d’esprit est le même que depuis le début. Notre objectif est de terminer la course en prenant un maximum de plaisir, comme toutes les autres équipes, explique Frédéric Sausset. Nous essayons d’être le plus professionnel possible et de conserver l’ADN de notre message qui est : ce n’est pas parce qu’on est porteur d’un handicap qu’on ne peut pas faire la même chose que les autres. Être au départ est donc une grande satisfaction. »

Association SRT41 bénéficiera d’une Oreca 07-Gibson, une voiture habituellement engagée en catégorie LMP2. Ce prototype a reçu des évolutions afin que Takuma Aoki et Nigel Bailly, deux pilotes paraplégiques, puissent la piloter en tenant compte de leur handicap. Ainsi, la voiture est équipée d’un accélérateur situé derrière le volant et d’un levier sur lequel les pilotes poussent pour freiner. Ce levier est muni d'une gachette pour leur permettre de rétrograder, un système similaire à celui utilisé par Alessandro Zanardi lors des 24 Heures de Daytona 2019. À noter que Takuma Aoki et Nigel Bailly feront finalement équipe avec Matthieu Lahaye qui remplace Pierre Sancinéna, blessé.

La persévérance comme leitmotiv

Pour se préparer à cette 89e édition des 24 Heures du Mans, l’équipe a participé à deux manches de l’European Le Mans Series (les 4 Heures de Barcelone et du Castellet, ndlr). « Nous nous sentons prêts car le travail effectué techniquement par Oreca et Graff convient très bien aux pilotes. Ils se sentent à l’aise au volant de la voiture. Nous avons beaucoup progressé, sur la piste comme lors des ravitaillements », affirme Frédéric Sausset.
Comme le règlement l’impose, Association SRT41 devra obligatoirement rentrer la voiture dans le stand pour procéder aux changements de pilotes. « Cette manœuvre nous fera perdre du temps mais nous avons trouvé des solutions qui nous permettent d’aller plus vite. Aujourd’hui, il nous faut environ 2’20 pour changer de pilote. Sur un circuit comme Le Mans cela nous fera perdre un demi-tour sur chaque passage de relai. »
Frédéric Sausset endosse désormais le rôle de team manager. Une situation bien plus stressante que celle qu’il a connue en 2016 lorsqu’il était au départ en tant que pilote. « Je préfère le stress lié au pilotage car lorsque mes pilotes sont en piste, je suis impuissant. Malgré ça, c’est très intéressant d’être parvenu à monter ce projet. Ça montre qu’avec de la persévérance, on peut réussir. Je suis vraiment ravi pour mes pilotes et j’espère qu’ils vont savourer car la semaine va passer très vite. »

L’engagement d’un équipage composé majoritairement de pilotes en situation de handicap démontre que les 24 Heures du Mans et la compétition automobile sont accessibles à tous. « J’ai ouvert une brèche en 2016. J’en ouvre une deuxième avec cet équipage et j’espère que, par la suite, il y aura d’autres possibilités. Il faut que des pilotes en situation de handicap alimentent les différents championnats », martèle Frédéric Sausset.

PHOTO : Frédéric Sausset entouré de ses pilotes Nigel Bailly, Takuma Aoki, Matthieu Lahaye et Pierre Sancinéna.